La Matze, l’aberration majoritaire

Que le projet de La Matze soit une aberration de haut vol (l’expression renvoie ici au dépouillement d’une cité pour favoriser les rendements privés d’un fonds de prévoyance lié à un établissement bancaire international), ce n’est plus à démontrer. Si un conseiller général sédunois avait encore quelque doute sur le sujet, je lui suggère le petit exercice pratique suivant : qu’il prenne au hasard un élu PDC (le parti encore majoritaire) ou un élu PLR (le parti du président) et qu’il lui pose cette douce question : si le locataire était votre propre entreprise, accepteriez-vous le contrat proposé par l’UBS ?

L’aspect financier frôlant la légèreté absolue, examinons les autres arguments qui ont été offerts à ma réflexion par quelques élus municipaux sur la place du Midi ce samedi :

1. La Matze est un symbole de Sion; la Ville doit conserver un regard à l’intérieur de l’édifice : un lieu pour joueurs de lotos, une halle pour des souvenirs d’avinés, un endroit près duquel un meurtre fut commis, et même mon habitation de naissance, tout cela ne fait aucun symbole, hormis pour ceux qui veulent transmettre aux citoyens ce que peut être le n’importe quoi en politique.

2. C’est soit ce projet, soit le néant : en somme, dites-nous merci de dépenser votre argent qu’autrement on vouerait au néant. Que l’on puisse ainsi raisonner est tout de même quelque chose !

3. On a assez attendu; Sion a droit à une salle de concert, alors cessons de tergiverser : le raisonnement est ici d’un rare cynisme; ceux du passé n’ont rien fait de bon pour la culture, dépassons-les et affrontons en héros le Mont-Ventoux de la culture sédunoise. Ces déraisonneurs ne savent pas même que Simpson est mort dopé sur les Hauts de ce col.

4. Si on dit non au projet, c’est le discrédit jeté sur la présidence : franchement, je ne crois pas une seconde que Marcel Maurer approuve une telle logique; si tel était le cas, je me serais lourdement trompé en ayant appelé il y a quatre ans mes concitoyens à le choisir de préférence à un notaire du PDC. Au contraire : un non du Conseil général suivi d’une brillante élection serait le signe que notre Ville a plus qu’un président : un homme qui sait qu’il a pu se tromper. Et il y en a au PLR de ces hommes et de ces femmes, peut-être même des Saviésans.

5. Le Conseil communal a approuvé le projet; le PDC y est majoritaire; dire non au projet, ce serait faire le nid de nos adversaires : si la résolution orange se borne à de telles arguties électorales, le citoyen sédunois n’est pas sorti de l’auberge de l’incohérence.

6. Dire non à La Matze, c’est avouer au peuple que l’Alliance de Gauche sait compter parfois mieux que la droite économique : Olivier Salamin a bien expliqué que la compétence n’est pas affaire de parti. Et sur ce terrain de l’actuariel simple, je ne suis pas ignare. Et qui peut sérieusement croire que Sion va devenir une ville rose en cas de prédominance du non !

7. Dire non à La Matze, c’est favoriser le traçage de ceux qui ont osé présenter le projet au Conseil général : cet argument est celui qui me parle le plus. Mais l’accepter, c’est faire croire que la politique, c’est simplement un jeu. Et ce qui est insupportable, c’est peut-être précisément le calendrier de la chose. Comment avoir osé présenter un projet de cette ampleur, si mal ficelé, à 12 jours du terme des élections communales ? Serait-ce que certains bureaucrates n’ont pas voulu que ce dossier soit soumis aux nouveaux élus, dont on ne sait pas encore très exactement quel est leur point de vue sur la culture en Ville de Sion. On aurait profité pour fixer définitivement ce choix avant les élections. Je n’ose croire que l’élu responsable puisse approuver cela. Et c’est peut-être ce seul argument qui m’inciterait, sans examen préalable des autres, de refuser d’apparaître, si j’étais conseiller général, aux yeux de ceux qui réfléchissent, comme une marionette dont les ficelles sont tirées par ceux-là mêmes qui ne veulent pas apparaître dans le débat public. Non, je n’ose croire que la politique soit de ce registre-là. Peut-être certains auront-ils cette même analyse et oseront-ils - sans refuser le projet - renvoyer le choix à une date rapprochée, mais postérieure à l’élection du prochain Conseil général.

La démocratie parfaitement comprise et acceptée exige parfois des lenteurs que l’UBS ne saurait combattre.

 

Post Scriptum I : Ce n’est pas interdit de signer la pétition « Pour une formation artistique accessible à tous ».

Post Scritpum II : Une solution élégante pourrait être, quant à La Matze, d’organiser un référendum populaire. Le Conseil général a cette faculté.

 

Photographie : de Jade; son titre : « avoir du flair« 

2 réponses à La Matze, l’aberration majoritaire

  • Francis dit :

    Aux élus du grand parti libéral-PDC sédunois,

    Fricotez avec qui vous voulez pour vos comptes privés mais si vous quittez les rivages du copinage pour un sondage, vous découvrirez une majorité de citoyens pour demander que notre bonne ville soit maintenue hors de portée des bancksters. Il n’est nulle part écrit que vous deviez être toujours, en tout, à l’opposé de votre électorat!

    Tenez-le-vous pour dit.

    Merci

  • Opale dit :

    Il faut rappeler que les Sédunois ont donné récemment 225 millions à l’UBS. Chaque Suisse a donné 7’500 frs pour le sauvetage de Marcel et ses vollaborateurs: 56 milliards : 7’500’000 Suisses = 7’500 frs.

    Soit 30’000 Sédunois x 7’500 frs = 225 millions. Coquette somme…N’est-il pas, Marcel? Faut-il en rajouter ou consulter le citoyen? Tout est encore possible.

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